Nature

René Amstutz
En 1914 déjà, lors de la création du premier parc en Suisse, le Parc National Suisse, la préservation de la nature était sa priorité. Depuis cette époque, ce parc a pour raison d'être une nature intacte et une dynamique naturelle. Plus d’un siècle après, les contextes socio-démographiques et économiques, tout comme les enjeux de protection des espèces et des biotopes, ont évolué : la biodiversité, à l’instar du climat, est en crise et les volontés politiques et les actions pour éviter l’irréparable sont insuffisantes.

Les parcs suisses sont des régions particulières à plus d’un titre, et constituent un espoir, une opportunité pour la nature. Les paysages culturels et naturels diversifiés et extensifs des régions plutôt périphériques couvertes par les parcs offrent une riche mosaïque d’habitats pour de nombreuses espèces animales, végétales, fongiques et autres. Nombre d’espèces disparues de nos paysages agricoles intensivement exploités retrouvent, dans les parcs, des habitats fonctionnels et des couloirs de connexion.

Par exemple :

• Le Parc naturel de la vallée de Binn et Pro Natura œuvrent pour la tulipe de Grengiols.
• Le Parc du Jura argovien a créé de nombreux plans d’eau pour le crapaud accoucheur.
• Le Parc du Doubs agit pour restaurer les habitats de la rare fritillaire pintade.
• Le Parc naturel régional de Schaffhouse promeut les abeilles sauvages dans les vignobles.
• Le Parc naturel Beverin débroussaille des pâturages pour préserver la diversité floristique.
• Le Parc régional Chasseral recense et protège les vieux arbres riches en insectes rares.

Ces initiatives, parmi d’autres, témoignent de l'engagement des parcs en faveur de la biodiversité. Fortement ancrés au niveau local et connectés à divers secteurs (politique, agriculture, tourisme, culture, etc.), les parcs doivent jouer un rôle central dans la protection de la nature. Cela passe par la sensibilisation, les offres éducatives, mais surtout par davantage d’actions concrètes sur le terrain.

Un besoin d’aires protégées dédiées à la dynamique naturelle

La Suisse reste à la traîne en matière de surface et de qualité d’aires protégées. Excepté le Parc National Suisse et les zones centrales des deux parcs naturels périurbains Sihlwald et Jorat, il n’y a quasiment pas de grandes aires protégées axées sur la dynamique naturelle. Pourtant, les besoins sont reconnus, et les possibilités existent, notamment dans l’espace alpin. Par leur travail et leurs activités en faveur de la nature et de la biodiversité, les différents parcs montrent l’exemple des bienfaits apportés à l’économie et à la société. Cela devrait motiver la population à davantage encourager les parcs en faveur de grandes aires protégées dédiées à la nature et à la dynamique naturelle.

Déjà dotés d’aires protégées (réserves forestières, réserves naturelles, biotopes spécifiques), les parcs constituent des territoires pilotes pour la mise en œuvre de l’infrastructure écologique nationale. Ils en ont établi les bases documentaires dans leurs périmètres, comme les cantons. Ils méritent maintenant un soutien accru pour concrétiser ces réalisations.

Les parcs se distinguent également par leurs collaborations avec les milieux scientifiques. De nombreux suivis et contrôles d’efficacité permettent d’améliorer les connaissances et d’orienter les actions pour la biodiversité. Le transfert de ce savoir est activement assuré à travers divers canaux (Internet, congrès, journées d’échange), au bénéfice de l’ensemble des acteurs de la protection de la nature.

Valoriser et préserver durablement le patrimoine naturel

J’invite les communes situées dans les parcs à mieux valoriser et protéger leur patrimoine naturel à long terme, en soutenant fortement les parcs. La Confédération et les cantons doivent aussi promouvoir davantage de grands projets de biodiversité portés par les parcs, afin que le label « Parc » tienne pleinement ses promesses.

Enfin, je recommande aux parcs de renforcer leurs collaborations avec les associations de protection de la nature pour développer des projets de conservation d’espèces, de revitalisation des milieux naturels et de gestion d’aires protégées – voire d’en créer de nouvelles.

De nombreux parcs sont prêts à intensifier leurs efforts pour préserver durablement leur patrimoine naturel, en guise de cadeau à la population. Ils sont sur la bonne voie et méritent un soutien fort !